Bilan de mes lectures 2018 dans la catégorie Essais
On termine enfin le tour d’horizon de mes lectures 2018 avec la catégorie des essais.
Gregory, La Machination Familiale
J’ai comme beaucoup de monde été marqué par « l’affaire Grégory ». D’autant plus que, né en 1984 – année du drame – j’ai pour ainsi dire toujours vécu avec.
La relance spectaculaire de l’affaire en 2017 a généré un déferlement de publications dans la presse (une constante dans cette affaire) et plusieurs ouvrages.
Celui de Patricia Tourancheau nous livre une approche très documentée, pour lequel elle est retourné interroger des protagonistes de l’époque.
Bien que l’on termine la lecture avec des soupçons, voire peut-être une intime conviction, l’auteur reconnait elle-même qu’aucune réponse claire n’existe à ce jour et qu’il faut attendre, encore, que quelqu’un parle…
Factuel et dépassionné, « Gregory, la machination familiale » constitue, à date, une bonne synthèse de l’affaire.
J’ai tué le fils du chef
L’ouvrage de Denis Robert, s’il aborde la même affaire, ne se situe pas dans le même registre.
Il s’agit plutôt d’un exutoire destiné à tourner la page de cette affaire qui aura marqué la vie de l’auteur.
Jeune journaliste à l’époque des faits, cette affaire, comme pour beaucoup de journalistes sérieux ou d’hommes de loi, va lui coller à la peau. Tel un fantôme, ce feuilleton judiciaire va hanter l’auteur pendant toute sa carrière. Mais bien au-delà, le livre témoigne de la place que peut prendre l’affaire dans la vie respective de chacun de ses observateurs.
Une page que Denis Robert met un point d’honneur à tourner dans la conclusion de l’ouvrage, après avoir passé en revue tous ses souvenirs, illustré par ses articles, les photos d’époque, et un regard désormais plus détaché des faits.
Ce livre constitue une pièce majeure pour qui voudrait dépasser le cadre purement journalistique de l’affaire et la découvrir à travers les yeux, les mots et les sentiments de l’un de ses témoins privilégié.
La langue géniale
Une déclaration d’amour au grec ! Le terme n’est pas volé.
Helléniste contrarié (et contrariant), la lecture de cette véritable pépite est une bénédiction.
Dans un style à la simplicité bienveillante, Andrea Marcolongo dédramatise complètement le sujet et ferait presque passer l’apprentissage du grec ancien pour un parcours de santé !
S’il ne faudrait pas nier les efforts à mettre en oeuvre pour dompter le grec ancien (mais quelle discipline ne demande ni efforts ni… discipline ?) l’approche du livre faire (re)découvrir les subtilités qui font la beauté de cette langue, dont les notre sont largement les héritières.
La richesse et la poésie de la langue grecque ne demande qu’à être découverte, même si vous n’avez aucune intention de lire du grec.
Même si pour vous, le grec constitue de mauvais souvenirs des bancs de l’école, je vous recommande chaleureusement la lecture de « La langue géniale » qui saura vous réconcilier avec cette belle langue !
Ecrire un livre en 30 jours
Les mots ont un sens.
Contrairement à ce que beaucoup semblent attendre de ce livre, son titre n’est pas « Ecrivez un roman publiable en 30 jours » ou « Ecrivez un bon roman en 30 jours ».
Le livre de Chris Baty, initiateur du Nanowrimo (National Novel Writing Month ce qui dans la langue de l’oncle Sam veut dire National Mois National de l’écriture de nouvelles) consiste en un recueil de conseils, règles de conduites et autres astuces pour justement réussir le challenge du Nanowrimo.
S’il existait une recette pour pondre des livres facilement sans risque de se planter, ça se saurait !
Le Nanowrimo permet de mettre le pied à l’étrier et, sous forme d’un challenge haletant et un peu rude, de jeter les bases de ce qui pourra, un jour, devenir un best-seller (si c’est bien ça votre but).
Ayant déjà tenté plusieurs fois la Nanowrimo, parfois avec succès (sans toutefois publier derrière car c’était vraiment médiocre), parfois sans parvenir à aller au bout, ce livre est un bon compagnon pour garder la tâte dans le guidon.
Certains points pourraient d’ailleurs s’appliquer à d’autres contextes, avec certaines nuances toutefois, tant l’objectif du Nanowrimo tend vers la quantité au détriment de la qualité, ce qui n’est pas recommandé dans toute entreprise humaine !
9,99€, la guerre du livre numérique
Les gens ont probablement déjà oublié comment tout a commencé pour la venue du monde du livre numérique tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Ce livre, appuyé sur les minutes du procès ayant opposé les parties prenantes du dossier (éditeurs, distributeurs, avec au premier chef Amazon et Apple), reviens en détails sur les étapes qui ont conduits à la situation actuelle.
Dans un marché qui se cherche encore et dans lequel de nombreux acteurs n’ont hélas pas encore pas confiance, ce petit ouvrage joue un rôle majeur de passeur de mémoire et nous éclaire dramatiquement sur la perception du livre numérique par tous les acteurs de la chaîne.
Initiation au jeu de rôle
Découvert par hasard lors d’une visite, elle-même inopinée, de la librairie spécialisée Trollune à Lyon, ce kit est pour moi une première incursion dans le monde merveilleux du jeu de rôle.
C’est un univers qui me démangeait depuis quelques temps déjà et je commençait à chercher un moyen d’y glisser un pied.
Après lecture et mise en oeuvre lors d’une (hélas) unique partie, force est d’admettre qu’il s’agit d’une bonne entrée en matière.
On regrette que l’intrigue soit extrêmement scriptée, mais c’est un passage obligé afin de guider au mieux nos premiers pas d’aventuriers. Toutefois, les marges de manœuvre ne sont pas larges et le Maître du Jeu (MJ) devra par moment trouver des trésors de créativité pour expliquer tel ou tel événement ou contrainte.
Le tout est excellemment bien présenté et plaisant à utiliser.
Cela donne envie de prolonger l’aventure !
D&D Dungeon Master Guide
Ouais je sais…
Ça n’a presque rien à faire dans la liste des « Essais ». Mais bon, d’une part je suis chez moi :p et d’autre part je savais pas où le ranger !
Donc après avoir expérimenté le jeu de rôle avec le livre du dessus, je suis rentré dans le dur en m’attaquant à la référence du genre : Donjons et Dragons.
Plus que le jeu en lui-même, c’est la création d’histoire et leur animation qui m’attire le plus. J’ai donc dévoré ce manuel avec avidité, l’achevant avec mille idées de campagnes en tête !
Au-delà du contenu, des règles qu’il présente et de l’inventaire d’objet conséquent qu’il renferme, le livre est très richement illustré, ce qui en fait un très bel objet très plaisant à lire.
Je poursuis en 2019 ma plongée dans cet univers avec l’ouvrage destiné aux joueurs et le bestiaire.
Tolkien, Auteur du siècle
Tolkien est un monument, pas seulement de la littérature fantastique, mais de la littérature tout court.
Pour vous en convaincre si vous en doutiez ou que la lecture de la communauté de l’anneau vous a semblé être un interminable catalogue de paysages, vous devez lire cet ouvrage.
Si la présente édition française a été publiée en 2016, sa version originale date de 2000. Et cela en fait justement toute sa force et toute sa valeur car cela signifie qu’il a été écrit avant le raz de marée provoqué par la sortie des longs métrages de Peter Jackson qui a fait naître toute une génération de « geek » et autre « fan de fantasy ».
L’ouvrage de T.A Shippey revient donc en détail sur les sous-bassement même de l’oeuvre de Tolkien. Ce qui nous permet de comprendre certains choix, certaines orientation du récit, à l’aune de la vie de l’auteur, du contexte historique et surtout de la langue, véritable outil que Tolkien utilise avec brio.
Nous plongeant au cœur de la philologie, le livre ne nous sert pas une simple pseudo analyse des métaphores du récit de Fantasy comme d’autres ouvrages simplistes le propose. Au contraire, dans un propos très fouillé et précis, l’oeuvre de Tolkien est disséquée sous nos yeux et l’on découvre, fasciné, toutes les subtilités – de langue principalement – qui échappe à nos sens de lecteurs plutôt passifs.
Un chef d’oeuvre à propos d’un chef d’ouvre. Voilà en synthèse ce que représente ce livre que tout aficionados de Tolkien se doit de lire au moins une fois !
Vices et Versailles
Le château de Versailles fait rêver beaucoup de monde. Et un bon conseil à donner pour ceux qui veulent un jour visiter l’un des joyaux du patrimoine français c’est, d’une part d’aller s’entraîner à Ikea pour apprendre à maîtriser une visite en sens unique (histoire d’éviter de se faire enguirlander par un vigile si vous avez l’outrecuidance de vouloir faire demi-tour au milieu du parcours), et d’autre part, c’est de ne pas lire ce livre.
Oeuvre de l’ancien responsable des jardins du parc renommé, les propos tenus, qui ne sont pas dénués d’intérêts par les quelques anecdotes narrées, sont le fait d’un homme aigri et blasé.
Sans doute incité par sa mise en retraite, le récit qui s’égraine page après page est plein de ressentiment et d’amertume, voire d’une certaine colère. Sous des dehors d’ode à ce prestigieux bâtiment, chaque chapitre est l’occasion pour l’auteur de se lamenter sur le thème universel du « c’était mieux avant ».
Chacun en prend pour son grade, qu’il s’agisse des politiques, des gestionnaires, ou, le plus souvent, des visiteurs.
On préférera à ce livre désabusé la lecture d’une bonne monographie sur le château et son parc, dépouillé de toute la négativité que laisse transparaître sciemment l’auteur de celui-ci…
L’âme d’une image
Ceux qui m’ont vu traîner sur les réseaux sociaux de l’internet mondial savent que je suis tombé dans la marmite de la photographie.
En ce domaine, comme dans tous les autres, on ne cesse jamais d’apprendre. Apprendre en pratiquant, apprendre en écoutant ceux qui maîtrise le sujet, apprendre encore en lisant sur le sujet.
Après avoir suivi un workshop en ligne de David DuChemin (photographe humanitaire canadien) le hasard a voulu que la version française de l’un de ses ouvrages soit publié par les éditions Eyrolles le jour de mon anniversaire 🙂
Ce livre est une véritable source d’inspiration et donne à voir un aperçu du travail de David DuChemin.
Bien entendu, c’est une lecture qui s’entend parmi d’autres, plus ou moins technique ou plus ou moins artistiques selon votre niveau de pratique. Mais la pratique photo ne peut s’améliorer que si l’on dépasse les seules considérations techniques pour s’élever vers la quête de sens pour nos images qui doivent pour principale vocation, non pas d’être simplement « nettes » mais de délivrer un message, une émotion. Bref : avoir une âme.
Un été avec Homère
Bien que n’étant pas auditeur de France Inter, la publication livresque de la chronique estivale de Sylvain Tesson a éveillé ma curiosité.
Mon passé scolaire (littéraire et historique) pendant lequel est née ma passion pour la Grèce me rendait le pitch alléchant.
Et le moins que je puisse dire, c’est que je n’ai pas été déçu !
La poésie avec laquelle l’auteur nous dépeint la Grèce et ses paysages, sculptés par la puissance des éléments qui s’y déchaînent, est d’une rare élégance.
Dans le même ordre, son approche très simple et didactique des deux poèmes majeurs d’Homère, l’Iliade et l’Odyssée, nous plonge dans ce passé ancestral, mythologique, mais nous ramène invariablement à notre présent, tant les propos du poète n’ont rien perdu de leur actualité.
Plus qu’un guide de lecture ou une analyse textuelle, le livre de Sylvain Tesson nous donne à observer minutieusement ces héros du passé pour mieux nous les faire apprécier au présent pour ceux d’entre nous qui auraient encore mal au crâne après la lecture ânonnée des vers originaux !
Le dernier jugement des templiers
La quatrième de couverture du livre de Simonetta Cerrini est pleine de promesses !
Saura-t-on enfin ce qui provoqua ainsi la chute de l’ordre politico-chevaliero-religieux le plus connu et le plus intriguant de l’histoire ?
Dans une étude très fouillée, principalement appuyée sur un document retrouvé par hasard, on suit avidement les derniers mois, les dernières semaines et les derniers jours des templiers et de son dernier grand maître.
Ce qui est étonnant avec ce livre, c’est qu’il s’agit objectivement d’un travail universitaire, digne d’une soutenance de Thèse, mais qui, contre toute attente, se retrouve dans les rayons de littérature générale de votre librairie préférée.
C’est un pari osé de la part de l’éditeur (dont j’ignore la réussite dans les chiffres de ventes) d’autant que la lecture est en fin de compte assez rude tant y sont entremêlés les références et que la multiplicité des intervenants doublé de plusieurs aller-retours dans le temps, nous font régulièrement perdre pied.
Un livre intéressant et instructif qui ne va pour moi pas assez loin dans son effort de vulgarisation qui justifierait son positionnement éditorial.
Que ferait Steve Jobs à ma place ?
Lu plus par acquis de conscience qu’autre chose.
Sorti peu de temps après le décès en 2011 du fondateur d’Apple, ce livre n’est clairement qu’une tentative mesquine de surfer sur l’appétence d’un certain public pour une prétendue « méthode Steve Jobs ».
Sauf qu’une telle « méthode » n’existe pas…
A minima, et c’est ce que propose ce livre, pouvons-nous observer les actions et réactions de Steve Jobs face à certaines situations ou certains problèmes.
Source d’inspiration indéniable, tenter d’appliquer à la lettre d’hypothétique « préceptes » de Jobs quand il faut plutôt voir des traits de caractère, est un non sens colossal et absolu.
En fin de compte, un livre qui vous en apprend moins sur Steve Jobs ou vos projets que sur la façon dont l’auteur perçoit Steve Jobs. Quoiqu’elle ne soit pas véritablement toxique, je déconseille cette lecture.
Face à Faces
Ma « madeleine de Proust » de l’année ! Michel Courtemanche a pour ainsi dire « bercé » mon enfance. Sans que j’en comprenne toujours tous les tenants et aboutissants, ses grimaces ont toujours eu sur moi un effet hilarant !
Ce livre est passé totalement inaperçu en France, un comble quand on sait le succès qu’à rencontré l’humoriste dans nos contrées.
Même si le vocable est abusif, ce livre signe le retour de Michel Courtemanche. Abusif, car si sa carrière a été incontestablement mise entre parenthèses, le bonhomme n’est pas resté inactif et n’a jamais complètement disparu des radars.
L’auteur se livre ici à cœur ouvert dans un exercice d’une rare sincérité dans lequel transparaît à la fois les fêlures mais également la perversité du système dans lequel il est tombé, comme tant d’autres.
Un livre très émouvant doublé d’une plongée nostalgique dans les années 90.
Psychologie de la connerie (Critique)
La psychologie de la connerie a connu (et connait encore à l’heure où j’écrit ces lignes) une notoriété dans les médias rare pour un livre hors fiction.
Est-ce parce qu’il y a un gros mot dans le titre ? Je ne saurais le dire.
Le fait est que les médias semblent fascinés par les cons et la connerie. Sans doute car cela leur donne un exutoire en ces temps de fake-news et autres
gilets jaunes, ainsi qu’une explication rationnelle à la défiance à laquelle ils sont confrontés.
Ce livre ne méritait à mon sens pas autant de publicité. Pour le reste, j’ai déjà tout dit dans ma critique.
Mimi
« Mimi » a été aussi vite enterré qu’il n’était apparu dans l’actualité.
Est-ce parce que tout le monde s’est empressé d’oublier ou d’effacer discrètement sa sortie ? Ou bien parce que son contenu était finalement plus pauvre que ne le laissait présager l’onde de frissons qui parcouru alors le monde politique et médiatique ?
Sans doute un peu des deux.
Si l’on découvre le parcours de Michèle Marchand, les auteurs se sont heurtés à tant de mutisme (pour ne pas dire « d’hostilité ») qu’ils n’ont finalement pas pu creuser bien profond. On devine néanmoins, entre les lignes, tout un tas de collusions malsaines, de petits arrangements, et au final un monde souterrain où se mêlent les puissants et les nantis.
Les auteurs nous décrivent finalement un monde de faux-semblants et de manipulations dont les classes moyennes et défavorisées se trouve les spectatrices à travers une presse people et magazine finalement assez manipulée.
C’est très bien écrit et les auteurs ont produit un travail remarquable mais le propos qu’il révèle est navrant. La France d’en haut a encore de beaux jours devant elle !
Qu’est-ce qu’un chef ?
Ce livre fait écho à celui de James Comey et devrait figurer dans les bibliothèques de toute personne en position de diriger quelque chose qui se respecte.
Bienveillant, l’ouvrage de Pierre de Villiers éclaire par un propos précis les qualités et savoir-être qui font de quelqu’un un « chef ». Mis bout à bout, ces « conseils » feront de vous un « bon » chef.
Pas besoin d’être au sommet de la hiérarchie militaire pour trouver dans ce livre de précieux enseignement sur le management et plus largement la nécessité de diriger, décider, trancher, arbitrer et conduire quelque chose. Y compris sa propre vie !
Comme dans son ouvrage précédent, Pierre de Villiers ne tombe ni dans la rancœur ni dans les regrets de son départ forcé, qu’il n’évoque d’ailleurs jamais.
Un livre d’une très grande classe, très bien écrit et d’une sagesse éclairante !