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Signe de vie : dans l’espace, on ne vous entendra pas pleurer

L’Histoire devrait nous avoir appris qu’il n’est jamais bon de jeter l’opprobre de manière trop catégorique et définitive sur les œuvres de l’esprit quelles qu’elles soient : films, musiques ou livres.
Certains à Libération savent qu’un jugement trop hâtif peut aisément se retourner contre vous quand le vent de l’histoire à tourné !

Malgré tout, conscient qu’une oeuvre jugée mauvaise à sa sortie peut devenir iconique et conscient que toute oeuvre de l’esprit est toujours porteuse d’une part d’humanité et témoigne de son époque, rien ne doit nous empêcher de débusquer la médiocrité, condamner la facilité et dénoncer ce qui est mauvais.

Tout ça pour dire qu’avec tout le respect que l’on doit aux créateurs, rien ne nous oblige a tout accepter pour autant.

Bon et avec tout ça, il en pense quoi du dernier Dos Santos ?

Bah a priori… pas que du bien…

On prend les mêmes et on recommence

Signe de vie est dans la même veine que les précédents opus de Sieur Dos Santos.
C’est probablement là sa seule vraie qualité : l’auteur est fidèle à son style et à son approche ou sa vision du genre romanesque.

C’est cohérent, et par certains aspects : courageux. Car bien que la formule d’écriture soit éculée, Dos Santos continue d’exploiter le filon. Difficile de se réinventer quand on tient une rente.

C’est cohérent, et par certains aspects : courageux. Car bien que la formule d’écriture soit éculée, Dos Santos continue d’exploiter le filon. Difficile de se réinventer quand on tient une rente.

Car c’est bien là que réside la plus grande force des romans de Dos Santos et qui réside dans sa plus grande faiblesse : le chemin est balisé, l’intrigue minimaliste, un pageturner élevé du fait de la haute prévisibilité des actions à venir, et surtout, l’impression de s’instruire à peu de frais.

Un Dos Santos, c’est comme une paire de charentaire : on se glisse dedans, c’est tout confort et on se laisse aller.

Malgré tout, ce n’est pas parce qu’un « truc » fonctionne qu’il n’est pas dénué de défaut. Et hélas, ils sont nombreux…

De vrais défauts

Il y a d’abord les écueils que l’on trouve dans tous les ouvrages de Dos Santos mais qui se trouve ici à un degré tel que l’on dépasse de loin les limites du supportable.
Et en premier lieu cette assertion empirique (et insupportable !) sur la véracité de toutes les informations scientifiques contenues dans l’ouvrage. Comme à chaque fois, le récit s’inspire ou s’appuie sur des fais « véridiques » et vérifiables : des fait divers, des théories scientifiques, etc.
Sauf qu’en conclusion de son ouvrage, dans une note finale abominablement longue (et qui résume tout l’ouvrage en 20 pages, bibliographie incluse !), l’auteur indique qu’il a quand même pu commettre des erreurs de retranscriptions de certains éléments, malgré la relecture et l’assistance de plusieurs intellectuels, universitaires ou chercheurs (portugais pour la plupart).
Où se trouve donc la vérité ?
Toujours dans le même domaine, certes l’ouvrage est documenté (on ne peut pas reprocher à l’auteur de ne pas s’être documenté sérieusement), mais la somme de connaissances accumulée cherche à être délivrée dans son intégralité ce qui d’une part rend le propos abscons par moment, mais surtout donne des scènes de dialogues improbables, absolument interminables et d’une lourdeur insupportable.
Véritables tunnels dans le récit, dont le rythme est déjà lent, on passe presque la moitié du récit à palabrer (sur des théories la plupart du temps) alors que le roman insiste par ailleurs sur l’aspect « contre la montre » du défi qui s’est engagé.
De cette avalanche de concepts, d’informations, de paraphrases de Wikipédia ou de notes de lectures condensées, on ne retient finalement que peu de choses.
Il serait tout à fait possible de parvenir au résultat en moins de temps et moins de pages.
Car si l’on dit des hommes politiques qu’ils « s’écoutent parler », Dos Santos aime incontestablement se regarder écrire.
De là découle les dialogues sans fin qui mériteraient largement d’être raccourcis, au profit de l’action.

A little less conversation

Une action que l’auteur semble ne pas beaucoup apprécier tant les scènes où il se passe effectivement quelque chose et qui n’implique pas uniquement des gens assis dans une salle en train de parler, ne sont pas bien écrites.
Dos Santos est bien plus à l’aise pour « vulgariser » des idées et des concepts scientifiques à travers la voix de certains de ses personnages que pour mener un propos romanesque.
Dans sa note finale, il écrit d’ailleurs que son roman cherche à expliquer des choses… Un roman raconte une histoire, qui peut traduire un point de vue, une opinion, etc.. mais en aucun cas servir de manuel scolaire ou d’ouvrage de vulgarisation.
La prépondérance du propos « documentaire » rend la lecture pénible et faire perdre de vue le caractère romanesque de l’ouvrage.
Dommage car du coup, il n’excelle ni dans un domaine ni dans l’autre…
A cela s’ajoute de vrais faiblesses d’écriture : abus du cliffhanger de fin de « chapitre », un suspens de façade du à quelques twists maladroits (mauvaise utilisation du fusil de Tchekhov), alors que dans le même temps, quand l’auteur se détache du factuel pour aller vers la pure fiction, la suspension consentie de l’incrédulité fonctionne plutôt bien.

Signe de vie ou rebond du chat mort ?

En résulte un sentiment très mitigé : l’ouvrage mériterait d’avoir moitié moins de pages ce qui n’enlèverait rien à son propos. Cela aurait obligé l’auteur à restreindre sa boulimie documentaire ou, tout du moins, à synthétiser d’avantage.

Du reste, le style de l’auteur se prête pour une fois assez mal à son propos et on aurait aimé un peu de prise de risque pour nous narrer quelque chose d’épique dans un style qui aurait pu l’être tout autant.

A lire avec prudence, car, au delà des concepts brassés, toute la documentation réunie et résumée correspond en outre l’idée que s’en fait l’auteur. Le propos, quoique se voulant scientifiquement objectif est donc quelque peu subjectif quand même.

S’il faut reconnaître un mérite à « Signe de Vie », c’est qu’un jour s’il ne reste que lui et que tous les autres auront brûlé ou seront perdus, les théories ou informations scientifiques qu’il brasse (et il brasse beaucoup), auront peut être ici leur dernière survivance. Les générations futures seront peut-être ravies de trouver là des traces d’un savoir perdu par ailleurs, comme d’aucun en leur temps furent émerveillés de retrouver les écrits survivants de Platon ou tant d’autres penseurs grecs. C’est tout ce que je souhaite à cet ouvrage, qui par ailleurs est oubliable…

Maître de ces lieux

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