Anno 1800 d’Ubisoft : bilan de Bêta fermée – février 2019
C’est quoi Anno 1800 ?
Anno 1800 est le dernier jeu produit et distribué par Ubisoft. Développé comme tous les autres épisodes de la série par Blue Byte, il propose au joueur de réaliser le développement d’une ville et de colonies dans le contexte du XIXe siècle.
Vous serez donc amené à bâtir les habitations, les centres de productions de matières premières, les bâtiments de services (pompiers, etc.) pour que vos administrés vivent dans l’opulence et la sérénité.
Mais dit comme ça, on croirait être en présence d’un simple City builder de type « Sim City » ou « Cities Skyline ». Or, la série des Anno, en plus de vous plonger dans des époques reculées ou futuristes, articule la mécanique de jeu autour d’un scénario et d’objectif à compléter.
Exigent, même pour les degrés de difficultés de base (quoiqu’en dise certains commentaires), le jeu vous demandera de conserver un équilibre savant entre développement et satisfaction des besoins de votre communauté.
A côté du mode campagne, qui déroule son scénario, se trouve des modes « bac à sable » ou vous cherchez à atteindre le plus haut niveau de développement sans guide particulier.
C’est quoi une bêta « fermée » ?
Sans écrire une thèse sur le sujet, rappelons que le développement d’un jeu vidéo (ou d’un logiciel quel qu’il soit) passe par plusieurs étapes.
Quand il n’est encore qu’aux prémices de son existence, il est en version dite de « développement ». Les lignes de code s’ajoutent donc les unes aux autres pour donner naissance petit à petit aux différents éléments : graphismes, intelligence artificielle, etc.
Quand il atteint sa première version « jouable » le jeu est publié dans une version « alpha ». C’est un premier jet manipulable mais qui est encore loin de correspondre au produit final. Les bugs y sont encore nombreux et certaines mécaniques de jeu peuvent être dans un état provisoire.
Cette version alpha n’est en général pas ouverte à grand monde et se borne à être déployée en interne au studio de développement. Parfois, une seconde version alpha, expurgée des problèmes les plus visibles, peut être proposée à une audience plus large comme c’est le cas par exemple chez Blizzard qui pousse une version alpha auprès des familles et amis des développeurs.
Alpha bête
On constate actuellement une tendance lourde de l’industrie à faire de ces versions alpha un levier marketing destiné à alimenter le financement du développement de jeux video. Nombreux sont les cas où l’accès « à toutes les phases de test alpha » sont proposées en contrepartie d’une précommande ou d’une participation à un financement participatif.
Jouant ainsi sur l’appétence des joueurs à « découvrir avant tout le monde » un jeu, ce qui était au départ une exception devient une règle assez malsaine consistant à déporter une partie du contrôle qualité sur les joueurs… en les faisant payer…
Le recours a ces versions alpha auprès du public de manière plus massive est également un moyen pour les éditeurs d’occuper l’espace et d’augmenter leur présence auprès du public. Le temps de développement d’un jeu étant relativement long, attendre la publication du jeu final ou même d’une version bêta est pour certains studio soit trop tendu en matière de trésorerie (ce qui peut en dire long sur la qualité de leurs jeux précédents) soit un raccourci pour abréger le cycle de développement en recueillant des feedback, techniques d’abord, mais plus largement sur des questions de gameplay, de scénario, etc.
On passe ainsi d’un projet porté par la vision des développeurs, des créateurs et du studio, à un objet mercantile destiné à satisfaire les désidérata plus ou moins valables du public impliqué.
Certes, l’éditeur a toujours le loisirs de ne pas prendre en compte les retours qui ne lui semble pas pertinent, mais pour les moins scrupuleux, qui cherchent avant tout à faire fonctionner la machine à cash, la tentation est forte de hurler avec la meute.
Quelques studios résistent à cette tendance et limitent au plus strict minimum les phases de tests préliminaires sur des versions non abouties, en concentrant par ailleurs leur attention sur les problématiques techniques, ce qui était à l’origine la raison d’être de ces versions.
Bon mais alors, une bêta fermée c’est quoi ?
Oui parce que bon, comme d’habitude je digresse, je digresse, mais j’en viens pas au fait.
Une version bêta donc, est le stade suivant la version « alpha », ce que vous avez intuitivement deviné si vous avez encore quelques notions de votre alphabet grec 😉
La version bêta d’un programme informatique, qu’il s’agisse d’un jeu ou d’un progiciel, présente un état plus avancé de son développement et donc plus proche de sa version finale. Largement expurgée de tous les problèmes les plus bloquants, il permet de le manipuler (presque) complètement afin d’en tester la plupart des fonctionnalités.
Avant que l’on ne recouvre de manière plus intensive aux versions alphas, les versions bêta constituaient les seules possibilités de manipuler un jeu avant sa publication définitive.
Le plus souvent sur invitation, elle peuvent à l’occasion être lancée à grande échelle. On parle alors de bêta privée pour les premières et publiques pour les secondes.
La bêta d’Anno 1800 de février 2019 était donc une bêta privée, entendu qu’il fallait en demander l’accès à l’éditeur, à l’inverse d’une bêta publique ou l’installeur du jeu et son accès ne sont pas restreint.
Les deux exercices n’ont d’ailleurs pas forcément le même but. Une bêta privée va se concentrer sur des éléments précis de gameplay (vérifier qu’une mécanique fonctionne comme le prévoyaient les développeurs), de techniques (performances, qualité des graphismes sur une variété de configuration matérielles, etc.) quand une bêta publique va chercher à éprouver l’infrastructure de l’éditeur (particulièrement dans le cadre de jeux en ligne). On parle alors de « stress-tests ».
Le jeu n’est malgré tout toujours pas dans sa version finale et les éléments présentés peuvent varier avec plus ou moins de différences avec la version finale, soit que l’éditeur ne présente pas tout pour se réserver des surprises dans l’édition finale, soit qu’il implémente sciemment des éléments qui ne figureront pas dans le jeu définitif.
Compte tenu de la largesse d’Ubisoft à distribuer des clés d’accès pour cette bêta fermée, on pourrait penser que nous n’étions pas très loin d’une bêta publique. D’autant que, contrairement à d’autres bêtas, il n’y avait aucune restriction sur la diffusion de contenu (les fameux NDA) ce qui contribue à une plus large médiatisation du titre.
Bon, et ça donne quoi du coup ?
Même si Ubisoft a pris la décision de repousser la date de sortie initialement prévue (du 26 février au 16 avril) afin que le studio puisse peaufiner son jeu, force est d’admettre qu’en l’état le titre est déjà très bon !
Et même plus que bon !
Graphismes
Les graphismes sont époustouflants, y compris dans des définitions de détails moyennes ! Poussés au maximum sur une machine puissante mais datée (ie. la mienne) le jeu conserve toute sa fluidité.
Les détails sont nombreux et la vie qui se déroule sous vos yeux est d’une incroyable richesse.
Les effets météos ainsi que les nuages provoqués par les usines donnent un aspect réaliste particulièrement saisissant.
Les textures des bâtiments sont impressionnantes de détails et on se surprend à contempler en gros plan tous les types constructions qui jalonne le monde que vous bâtissez.
Rien que pour les yeux, le jeu vaut le détour !
Bande son
Là encore le travail produit est exceptionnel.
Un thème grandiose, une ambiance musicale qui s’adapte aux évènements. Décidément, la copie rendue sur ce point s’avère parfaite !
Par ailleurs, chaque bâtiment ou chaque activité dispose de ses propre effets sonores ce qui renforce le sentiment de vie et de réalisme.
Durée de vie
Colossale tout simplement !
Si l’on ignore bien entendu l’étendue de la campagne, le mode « sandbox », fidèle à l’esprit de la série, s’avère redoutablement addictif, rejouable et aux possibilité presque infinie.
La variété des environnements et des missions disponibles renforce cette durée de vie.
Jouabilité
Le titre reprend et affine les mécaniques de jeu de la série tout en capitalisant sur les ajouts intégrés au fil des différents opus.
L’interface classique ne dépaysera pas les vieux briscards et est suffisamment intuitive pour les néophytes.
Comme dans chaque opus, la recherche de l’équilibre en toutes choses sera votre principale préoccupation. Avoir suffisamment de main d’oeuvre pour faire tourner les équipements destinés à produire les biens ou denrées nécessaires pour satisfaire et faire vivre cette main d’oeuvre, tout en veillant à ce que les conditions de vie soient agréables afin que votre cité soit attractive, ce qui implique de faire attention à ce que vos industries polluantes, qui vous permettront de faire avancer le « progrès » ne gâche justement pas trop cette harmonie, etc.
Bref, Anno, c’est un jeu de gestion mais surtout un jeu d’équilibriste 🙂
Comme toujours une gestion fine de l’économie ainsi qu’un rôle important du domaine maritime sont de mise. Vous aurez ainsi l’occasion de visiter les tropiques lors d’expéditions de colonisation.
Scenario
Difficile, voire impossible de juger ce point là, le mode campagne n’ayant pas été proposée.
Mais si l’on se fonde uniquement sur l’aspect « évolutif » de la société que l’on bâtit, avec la succession de période ou « âge », un peu à la mode d’un « Civilization », force est d’admettre que les choses sont encore une fois classiques mais solides.
A chaque nouvelle itération votre société avance vers plus de progrès, de technologie, de raffinement. Mention spéciale pour les zoo et autres bâtiments tout de verre vêtus, qui, outre leur cachet, rendent justice aux avancées réalisées à cette époque.
En conclusion
Ce titre est Gé-nial ! Tout simplement.
Richement documenté, le jeu est un hommage vibrant à cette époque de notre histoire qui voit les début de l’industrialisation et qui pose les fondations de notre monde moderne.
Période de transition qui n’était pas nécessairement évidente à traduire en jeu vidéo grand public, Blue Byte et Ubisoft réussissent ici un pari audacieux et très réussi.
Reste que pour ma part, je suis toujours aussi mauvais à ce type de jeux, ma gestion financière dispendieuse et ma folie des grandeurs ayant souvent raison de mes ambitions de parties au long court 🙂
Pour un tour d’horizon plus complet et en image, je vous recommande la série publiée par Koinsky dont je publie ici la première vidéo
Rendez-vous avec impatience le 16 avril prochain. Et en attendant, moi je retourne poncer les deux derniers opus Anno 2070 et Anno 2205 histoire de me refaire la main !