Lève-toi et code : Confessions d’un hacker
Est-ce qu’un ton détaché et condescendant est le gage d’un esprit rebelle ou d’une pensée supérieure ?
D’aucun pourraient me reprocher d’employer moi-même ce type de langage. Témoignage d’une jalousie non feinte envers les auteurs desquels je ne chercherais qu’à détruire le travail.
Parce que c’est le ton employé tout au long de Lève-toi et code.
Lève-toi et code est censé nous décrire les “aventures” d’un hacker naviguant dans les strates les plus obscures du net afin d’y commettre divers méfaits lui rapportant de l’argent sonnant et trébuchant.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le roman échoue dans à peu près tout ce qu’il entreprend.
C’est l’histoire d’un type énervé assis dans son fauteuil
C’est à peu près ce à quoi se résume l’intrigue.
Assez peu étonnant lorsque l’on évoque le milieu des pirates informatiques, dont l’image d’Epinal est justement celle de geek boutonneux, confinés dans une chambre ou cave sans lumière, perché sur un fauteuil le nez vissé sur les écrans où clignotent des lignes de code.
C’est tellement cliché, que décrire de tels personnages relève presque de la faute de goût. Et de l’absence de culture.
Parce que par ailleurs, le propos du livre est assez maladroit avec les concepts qu’il brasse.
Au premier rang desquels le “fameux” darknet.
Le darknet est un endroit du monde numérique fascinant. Difficile à expliquer et à décrire, mais fascinant. Déjà que l’internet « normal » n’est pas de plus évident à expliquer. Alors s’attaquer à sa frange la plus obscure est une tâche ardue.
Bon, ça ça n’est valable que si on ne s’adresse qu’à des néophytes. Quand il s’agit d’en parler à des qui savent “un tout petit peu” de quoi il s’agit, la vulgarisation touche à ses limites. Et l’on est en droit de s’attendre à quelque chose d’un peu plus consistant.
Tout ça pour dire que, derrière son ton faussement désinvolte et révolutionnaire, Lève toi et code ne parvient ni à vulgariser le sujet, ni à se montrer suffisamment expert pour en donner une vision convaincante.
Comme l’on fait remarquer à juste titre d’autres lecteurs, le début du roman ne donne pas vraiment envie de s’attacher au narrateur. On est face à quelqu’un qui se place dans le rôle d’un aigri, pour on ne sait trop quelle raison, à part un certain déterminisme social ou une violente envie de glander.
Hacker’s life
On ne va pas faire un cours sur le hacking. Ce n’est pas le lieu et si ça vous intéresse il existe d’excellentes et nombreuses ressources sur le sujet.
La chose principale à retenir pour ce qui nous occupe ici, c’est la notion que le hacking n’est pas toujours une pratique malveillante. On ne retient avec ce terme que les pratiques douteuses, souvent illégales, de types doués avec “l’informatique” (mon Dieu, cette expression fait tellement XXe siècle !)
Mais en vérité, un hacker est quelqu’un qui parvient à faire faire quelque chose à un objet ou un système qui n’était pas prévu pour cet usage à l’origine. Tout ça pour dire qu’un hacker peut tout à faire être un quidam qui a utilisé un plan de travail de cuisine Ikéa pour s’en faire un établi de bricolage.
Dans le monde de “l’informatique” il existe des hackers dont le but n’est pas de s’enrichir ou de nuire à autrui, mais justement de rendre publique les failles exploitables dans le but, avoué, que les systèmes défaillants puissent être mis à jour afin de se protéger.
Tout ça pour dire que Lève-toi et code ne renvoie qu’une image négative, particulièrement affligeante et grotesque des hackers.
Du reste, le personnage principal ne pose pas une seule ligne de code de toute l’intrigue, se contentant de jouer avec les failles assez basiques du système. Un gros geek un peu aigri, mais pas une pointure non plus.
Une seule question : pourquoi Lève-toi et code ?
Le roman ne renvoie donc pas une bonne image du hacking, ni même une image honnête de ce milieu. Son titre tape franchement à côté et le personnage principal (n’appelons pas cela un héros) n’attire aucune sympathie.
Du coup, à quoi sert ce roman ?
On ne passe pas un bon moment à sa lecture, et le peu de concepts qu’il brasse n’apporte aucun élément d’information dont on pourrait s’instruire.
L’intrigue est plutôt banale, pour ne pas dire franchement insipide, pour un dénouement qui, là encore, nous laisse de marbre sinon indifférent. Quand au style, il est plutôt passable même avec la volonté de reproduire le phrasé d’un ado sur le tard.
Ma conclusion est donc aussi brutale que tranchée : passez votre chemin. Préférez lui l’excellent ouvrage d’Edward Snowden, assez subtilement recommandé à la vente sur la plupart des librairies en ligne.