Et l’imagination prend feu de Christelle Dabos
Dans la tête d’un auteur
Il est toujours passionnant de se plonger dans les entrailles d’un écrivain. Découvrir, avec un certain plaisir coupable, les affres de doutes et de difficultés par lesquelles il a finalement accouché de son oeuvre. Car on voudrait tous croire que la prose coule sous leur doigts agiles, dictés par l’inspiration quasi divine et que les mots se déploient presque d’eux même, sans effort, sans doute ni hésitation.
Mais il n’en n’est rien.
Bien entendu, il y a toujours les exceptions qui confirment la règle. Des pointures qui s’adonnent à de très longues séances d’écriture ininterrompue, d’une seule traite, sans que leur volonté ne défaille ou que le doute les assaille. Mais dans l’ensemble, pour ne pas dire l’immense majorité, le travail s’écriture est disons plus… douloureux. Et quelque part, c’est normal. J’allais presque dire que c’était bien.
Ecrire, raconter une histoire, c’est mettre un peu de soi sur la page ou sur l’écran. Et forcément, pour sortir un peu de soi, cela coûte. Cela doit coûter.
Enflammer le brasier de l’imagination
Christelle Dabos nous livre (sans mauvais jeu de mots) tout cela dans un récit à la simplicité et la sincérité touchante. S’il est bien entendu question dans “Et l’imagination prend feu” de son parcours éditorial qui l’a propulsée sur le devant de la scène littéraire avec sa saga à succès “La passe miroir” (précisons tout de suite que je n’ai pas lu cette série), l’auteur aborde également des points beaucoup plus pratiques, pour ne pas dire technique, qui éclairent le quotidien d’un écrivain.
Cela part de son environnement de travail et de son canapé, lieu d’écriture par excellence, jusqu’aux outils qu’elle emploie pour coucher les mots sur l’écran, en passant par toutes les méthodes et tactiques mises en oeuvre pour faire progresser son oeuvre malgré l’adversité.
Le parcours d’écriture décrit dans le livre est beaucoup plus authentique que dans un manuel destiné à décrire “comment” écrire un livre et parvenir à se faire publier. Mais cela ne signifie pas, loin de là, qu’il s’agit d’un modèle à suivre ou à reproduire. Il faut le prendre pour ce qu’il est : un témoignage du parcours de Christelle Dabos en ce qu’il a de personnel, et donc, d’unique.
Tel un récit de voyage, qui vous présentera certes un itinéraire et des paysages traversés, que vous suivrez à lettre, vous ne reproduirez pas vraiment, sinon pas du tout, la même expérience que son auteur. Tout cela pour dire qu’il ne faut pas considérer le récit de Christelle Dabos comme une “recette” à suivre. Elle se garde bien d’ailleurs d’entrer dans certains niveaux de détails, car il s’agit plus d’un récit initiatique et personnel.
Rien ne vous interdit d’adopter les mêmes outils, le même canapé, de vous attaquer au même univers de l’imaginaire ou de concourir vous aussi à un concours d’écriture. Mais ce qui a fait son succès, et qui doit inspirer l’admiration, ne garanti pas le succès des auteurs en herbes qui se placeront dans ses pas.
Une mine d’or précieuse
Cet ouvrage, emprunt d’humour et d’authenticité, s’adresse aux aficionados de Christelle Dabos, qui, s’ils connaissent déjà, de l’aveux même de l’auteur, presque tout d’elle et de son oeuvre, complèteront néanmoins par cette lecture leur connaissance et leur “proximité” avec leur auteur favori.
Il s’adresse aussi aux curieux, qui découvriront ainsi les coulisses du monde de l’édition à travers l’un de ses acteurs.
Il s’adresse enfin aux auteurs amateurs (dans le sens noble du terme). Ils pourront y piocher de précieuses informations, dont certaines peuvent se transformer en conseils. Qu’il s’agisse des dialogues, de la vision des personnages, de la gestion du point de vue, il y a forcément une bonne idée à prendre et des sujets à méditer.
Et l’imagination prend feu demeure un témoignage précieux car sans détours. La pureté de son propos a quelque chose de rafraichissant, loin des mémoires lénifiantes de certains auteurs ou célébrités.
Une lecture enrichissante prélude pour les plus curieux qui ne l’aurait pas lu, à se plonger dans l’univers de Christelle Dabos.