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Paradox Hotel de Rob Hart

Bienvenue au Paradox Hotel

Après “Autant en emporte le temps” dont je suis un fan absolu, Paradox Hotel incarne l’expression parfaite de la thématique des voyages temporels.

Ecrire sur le temps et ses manipulations, pour ne pas réduire à la seule problématique des voyages temporels, est un exercice périlleux sur lequel même certains des plus grands scénaristes hollywoodiens se sont cassés les dents.

C’est à dire que le concept des flux temporels, de leur altération et de leur infinité de variations peut devenir un véritable piège narratif. Il est déjà si simple pour un récit de tomber dans l’incohérence même quand celui ci reste en ligne droite. On a vite fait, si on n’y prend pas garde d’oublier que son personnage est déjà entré dans une pièce et qu’on ne l’en a pas encore fait sortir avant de le faire entrer à nouveau. Et ainsi de suite.

Manipuler le temps, c’est manipuler plusieurs dimensions.

Et Paradox Hotel réalise une prouesse incroyable. Car non seulement c’est un sans faute sur l’exécution, mais en plus il propulse le concept de manipulation temporelle pour le coup dans une toute autre “dimension”.

Je n’ai pas connaissance d’ouvrage de fiction dans lequel il n’est pas seulement question de voyage temporel mais ou ces derniers prennent une dimension politique. Au lecteur de SF assidu qui passe par là, ma reconnaissance éternelle pour les suggestions qu’ils pourront me faire sur le sujet.

Retour vers le futur

Le Paradox Hotel est situé à proximité d’un chronoport duquel les voyageurs peuvent se rendre dans différentes époques pour les visiter. Un peu comme un musée à ciel et à chronologie ouvert. Le voyage dans le temps est parfaitement maîtrisé. A tel point qu’il faut bien veiller à la sécurité des voyageurs mais également… du flux temporel.

Car si tout un chacun ou presque est libre de se rendre en certains points de l’histoire, aussi simplement que s’il empruntaient un vol pour une destination lointaine, il ne faudrait pas, par mégarde ou malignité, que ces touristes d’un nouveau genre en viennent à perturber, ou pire, transformer, le flux temporel et donc modifier le futur.

January, l’héroïne du roman, est donc en charge de la sécurité au sens large. Et quand l’hotel se retrouve au coeur d’une véritable lutte politique, son rôle prend tout à coup une toute nouvelle dimension.

Paradox Hotel évite le piège, tentant, qu’il y aurait eu à se contenter de décrire et nous faire vivre le concept fascinant derrière le principe d’un hub de voyage temporel. Le processus est décrit assez brièvement dans une séquence d’action particulièrement bien écrite et qui s’inscrit parfaitement dans le récit. Et cela suffit.

Pour le reste, l’intrigue, qui confine au huis-clos dans un timing hyper serré, ne nous laisse aucun temps mort. Derrière l’intrigue mi psychologique, mi policière, le récit est tout autant l’occasion de brosser des portraits de personnages attachants (même lorsqu’ils ne sont pas humains), dotés de caractères forts, que de créer des situations dramatiques propres au genre du thriller.

Et tout le génie de l’auteur réside précisément à nous délivrer une histoire cohérente, consistante, en faisant s’entremêler dans une valse parfaitement maîtrisées les pas de deux des différents personnages qui naviguent dans un continuum toujours plus perturbé.

Il y a aurait de quoi y perdre le fil. Mais c’est tout le contraire qui se passe grâce au sens aigu de la tension narrative qui distille au fil du récit les clés discrètes de la résolution finale.

Time to time

L’avenir dira si les déplacements temporels seront un jour une réalité. Dans l’attente de cette hypothèse, qu’on la désire ou non, Paradox Hotel met habillement en scène les écueils réels ou supposés de telles manipulations du temps.

Et s’il ne devait rester qu’une seule certitude qui devait subsister et résister, justement, au passage du temps, c’est que l’homme reste fidèle à lui même. Principalement vénal, entre autres vices. Ce qui n’empêche pas certaines âmes bien intentionnées, à l’image de l’héroïne, de se sentir comptables vis à vis de leur semblables et de s’attacher à leur bien être et leur sécurité plutôt qu’à leur propre besoins.

Paradox Hotel est, comme toute œuvre de science fiction, porteur de beaucoup de sens, de questionnements de notre époque et de poésie.

Un livre coup de coeur, bourré de bonnes idées bien exécutées, qui nous scotche de la première à la dernière page !

Maître de ces lieux

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